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“Le Fils de Saul”, de László Nemes, a reçu le Grand prix du Jury au dernier Festival de Cannes… Ce film décrit la vie des Sonderkommandos. Entre 1943 et 1945, des prisonniers juifs, immatriculés au camp de concentration d’Auschwitz-Birkenau, vécurent la Shoah, le génocide juif, cette catastrophe de l’humanité, avec un violence inimaginable, différente des autres déportés. Il s’agit des membres du Sonderkommando, une équipe spéciale chargée du fonctionnement des chambres à gaz et des crématoires mis en place par les nazis. Ils ont supporté les images d’horreurs, les cris des femmes et des enfants, les hurlements de leurs frères et les coups et la monstruosité sadique des nazis.
Ces hommes juifs furent obligés par les SS de faire une tache horrible : forcer leurs frères juifs ou non juifs à se dévêtir et à entrer dans les chambres à gaz. Puis ensuite de les bruler et disperser leurs cendres. Ce film raconte une autre histoire celle d’un homme, Saul Ausländer, interprété par Géza Röhrig, poète, comédien, romancier, enseignant. Un mot de cet homme qui incarne Saul, qui est Saul, qui donne vie à Saul. Géza Röhrig est né en Hongrie communiste, il a séjourné en Pologne puis en Israël et s’en est allé à New York étudier dans une Yeshiva.
C’est la bas qu’il rencontre Laszlo avec qui il partage l’amour du judaïsme et le milieu juif orthodoxe. Laszlo a eu une partie de sa famille assassinée à Auschwitz. Geza a visité Auschwitz et depuis il vit sa judéité . Son visage qui n’exprime ni douleur ni colère, ses yeux secs, son jeu d’une sobriété extrême hantent les spectateurs bien après la fin du film. Une performance extrême.
Saul reconnait ou croit reconnaître dans le corps d’un jeune garçon mort son fils. Il veut lui donner une sépulture. La vie contre la Mort ! Ses autres compagnons ont décidé de se révolter et un soulèvement se prépare en secret. Ils considèrent que Saul va leur faire louper leur évasion. Ils parviennent à disposer de poudre explosive subtilisée dans une usine d’armement du complexe d’Auschwitz, l’Union-Werke, et transférée grâce à ce mouvement de résistance clandestin du camp. Il faut garder en mémoire qu’Auschwitz-Birkenau, fonctionne comme une usine à produire des cadavres, puis à les éliminer. Lors de l’été 1944, elle tourne à plein régime : les historiens estiment que 10 à 12 000 juifs y sont assassinés chaque jour. Pour les Sonderkommandos, la tâche est épuisante, et ils sont éliminés régulièrement par les SS, tous les trois ou quatre mois, à la fois parce que leur rendement faiblit et parce qu’il ne doit rester aucune trace de l’extermination. En tout, plus de deux mille personnes ont fait partie des Sonderkommandos d’Auschwitz. Seuls quelques dizaines ont survécu en s’échappant.
Ce film parle d’humanité. Saul est mort, il le sait, il le dit plusieurs fois dans le film. “On est mort”. C’est un cri en silence
Saul veut donner une sépulture à un gamin qui croit être son fils, qu’il le soit ou qu’il le soit pas, c’est son cœur d’homme qui lui dicte ses pensées et ses pas. Il veut l’enterrer en lui récitant le kaddish et pour cela, il va chercher désespérément un rabbin. Il veut le faire pour être libre, libre d’être un homme et plus une machine à obeir. Son obsession l’égare, ses amis mettent au point une révolte et lui, il est là avec son obsession. Tous rêvent de fuir cet enfer ….. et tous finiront de la même façon.
En enterrant ce petit, c’est comme s’il enterrait toutes les victimes du nazisme
Tout le film c’est le regard de Saul. On ne voit que ce qu’il voit, ni plus ni moins.
Juste quelques échanges de regard, entre lui et une jeune femme qui va fournir la poudre pour la révolte, regard entre un possible « rabbin » qu’il voit descendre d’un wagon et lui. La plus belle scène du film, celle qui m’a fait pleurer ! « Oh dieu tout puissant », me suis-je mis à crier dans la salle. « Une lueur d’espoir, un peu de lumière dans cet enfer dans l’enfer ! » Passage de la lumière éternelle entre les hommes.
Et puis il y a le son qui prend au cœur, qui le fait battre deux fois plus fort
Des sons qui illustrent les hors-champs qu’on ne voit pas mais qu’on imagine; des pleurs d’enfants, des cris, des prières, des coups de feu. Sans images, tous ces sons nous font imaginer le chaos de Birkenau fait d’aboiements, de coups de feu, d’ordres hurlés et le bruit métallique des trains qui arrivent, des cris en différentes langues d’une foule paniquée. Et le visage de Saul, impassible, sans émotions. Même quand son regard se pose sur l’enfant mort.
« La caméra est sa compagne, elle reste avec lui à travers l’enfer « a dit le jeune réalisateur qui dit avoir été inspiré par le livre “Des voix sous la cendre“, connu également sous le nom des « rouleaux d’Auschwitz ». Il s’agit de textes écrits par des membres des Sonderkommandos du camp d’extermination, enterrés et cachés avant la rébellion d’octobre 1944, puis retrouvés des années plus tard, sous la terre. Ils y décrivent leurs tâches quotidiennes, l’organisation du travail, les règles de fonctionnement du camp et de l’extermination des Juifs, mais aussi la mise en place d’une forme de résistance. Forcés à faire cette horrible besogne, quelques Sonderkommandos voulaient avertir le monde et leur seule façon, fut d’écrire leur quotidien, et de consigner leur témoignage sur du papier qu’ils ont enterré comme ils ont pu au sein même d’Auschwitz –Birkenau.
C’est ce qu’on appelle les manuscrits d’Auschwitz, ou les rouleaux d’Auschwitz. Ils ont été retrouvés entre 1945 et 1980.
Cinq rouleaux ont été retrouvés après la guerre. Les équipes étant liquidées et remplacées à intervalles réguliers, pas un seul de ces témoins n’a survécu.
Trois de ces manuscrits rédigés par Zalmen GRADOWSKI, Lejb LANGFUS et Zalmen LEWENTAL (tous trois prisonniers membres des Sonderkommandos et qui furent tués) ont été présentés au Mémorial de la Shoah, dans une nouvelle traduction du yiddish pour partie inédite en français. A ces manuscrits, s’y ajoutent les dépositions, faites lors du procès de Cracovie en 1946, de trois rescapés des Sonderkommandos – qui confirment, entre autres, le massacre des juifs de Hongrie au printemps 1944 -, des documents d’histoire, des photographies, les archives allemandes
J’ai appris sur un site dirigé par une femme, Mme Véronique Chevillon, historienne qui se dédie entièrement depuis des années à la mémoire des membres des Sonderkommando qu’il y a encore d’autres rouleaux enterrés mais que plus personne ne désire les déterrer ! On dit que le gouvernement polonais a fait construire des logements, des monuments et ne désire pas creuser pour les « ressusciter». Il existe de nombreux manuscrits enterrés par les Sonderkommandos autour des crématoires, qui n’ont jamais été cherchés de façon systématique par les historiens et archéologues. La réponse toujours donnée est “les Polonais ont tout pillé immédiatement après l’évacuation du camp, à la recherche d’or”.
Véronique Chevillon précise entre autre ceci :« En 2005, grâce au Mémorial de la Shoah à Paris, ont été réédités des “Manuscrits sous la cendre”. Il s’agit de textes d’une valeur inestimable, parce qu’écrits jour après jour par différents membres de Sonderkommandos de Birkenau. En tant que tels, ils se savaient condamnés à mort à plus ou moins brève échéance et ne voyaient de sens à survivre dans ces “commandos spéciaux” que par ces textes qu’ils nous transmettraient en les cachant, enterrés, à proximité des crématoires (ce qu’ils écrivent explicitement). Or il s’avère qu’aucune recherche systématique, de type archéologique, ne semble jamais avoir été entreprise autour des quatre crématoires d’Auschwitz Birkenau. Voilà quelque chose qui est incompréhensible et profondément choquant.
De ce fait, l’exhortation de Zalmen Gradowski, l’un des auteurs de ces manuscrits : « Va chercher dans chaque parcelle de terre, à Birkenau, nous y avons enfoui des dizaines de documents » résonne douloureusement…
Il semble en fait que la découverte de ces manuscrits soit due au hasard à l’exception des trois premiers, en 1945, notamment lorsque des survivants sont allés chercher eux-mêmes les textes de leurs camarades. Les quatre autres en revanche ont été respectivement trouvés en 1952, 1961, 1962 et pour le dernier (à l’heure actuelle) 1980 !
De même, lorsqu’on regarde de plus près ce qu’il en est des parcours de ces différents manuscrits, on constate que leur édition aussi a été un combat. En effet, le second manuscrit de Gradowski, par exemple, transmis par un Polonais à un survivant Juif partant vivre en Israël, n’a pas pu être édité jusqu’à la fin des années 70 où Haïm Wolnermann, qui en était le possesseur, a fini par le publier à ses frais. Ce type d’exemple pourrait être multiplié car très nombreuses sont les situations où aucune autre explication ne peut convenir que le refus d’entendre les témoignages de ces hommes. »
Des témoignages poignant sur l’obligation d’accomplir des actes déshumanisants dans des conditions immondes, extrêmes et de devoir obéir pour conserver le “droit” de survivre.
Dans ces terribles situations, le choix et la réflexion individuels sont totalement annihilés, interdits. Le seul “choix” imposé par les Nazis qui existe encore est : obéir ou être exécuté sur le champ ! La limite ultime à ce “non-choix” est de devoir nuire à la vie d’autrui.
On ne connait pas de cas de volontariat pour cette activité. Tous refusaient ce travail, et ils étaient tous conscient qu’il permettait et accélérait l’extermination de frères et de sœurs.
Le 7 octobre 1944, cette révolte dont parle le film eut lieu. La révolte des Sonderkommandos d’Auschwitz-Birkenau fut réprimée dans le sang. Les SS exécutèrent 452 membres en quelques heures, tandis que le crématorium IV est incendié et mis hors d’usage.
Ce film parle de ces hommes déportés qu’on obligeait à cesser d’agir en être humain. Ces déportés ne pouvaient pas laisser transparaître la moindre émotion. S’ils pleuraient, s’ils montraient de la colère, ils étaient abattus aussitôt. Alors ils se focalisaient sur leur travail, couraient la tête basse pour ne pas recevoir de coups. Tous les acteurs du film sont remarquables ! Ils rendent hommage à ces hommes oubliés et Saul, pour survivre doit accomplir un acte qui a du sens, un sens humain, sacré, qui est à l’origine même de la communauté des hommes et des religions : respecter le corps
L’enfant ne sera pas brûlé et ses cendres ne seront pas dispersés ……
Le kaddish sera dit
vè’al kol Israël, vè’imrou
Amen
# | Traduction française | Transcription | Araméen / Hébreu |
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1 | Magnifié et sanctifiéb soit le Grand Nom.a | Yitgaddal vèyitqaddash sh’meh rabba | יִתְגַדַל וְיִתְקַדַשׁ שְמֵהּ רַבָא. |
2 | dans le monde qu’il a créé selon sa volonté | Bè’alma di vèrah khir’outeh | בְעָלְמָא דִי בְרָא כִרְעוּתֵהּ |
3 | et puisse-t-il établir son royaume | vèyamlikh malkhouteh | וְיַמְלִיךְ מַלְכוּתֵהּ |
4 | puisse sa salvation fleurir et qu’il rapproche son oint.ad | veytzmakh pourqaneh viqarev meshi’heh | וְיַצְמַח פֻרְקָנֵהּ וִיקָרֵב מְשִיחֵהּ |
5 | de votre vivant et de vos jours | be’hayekhon ouv’yomekhon | בְחַיֵיכוֹן וּבְיוֹמֵיכוֹן |
6 | et [des jours] de toute la Maison d’Israël | ouv’hayei dekhol bet Israël | וּבְחַיֵי דְכָל בֵית יִשְרָאֵל |
7 | promptement et dans un temps proche ; et dites Amena. | bè’agala ouvizman qariv ve’imrou amen | בַעֲגָלָא וּבִזְמַן קָרִיב. וְאִמְרוּ אָמֵן |
Les deux lignes suivantes sont répondues par l’assemblée des fidèles, avant d’être reprises par l’officiant : | |||
8 | Puisse son grand nom être béni | yèhè sh’meh rabba mevarakh | יְהֵא שְמֵהּ רַבָא מְבָרַךְ |
9 | à jamais et dans tous les temps des mondes. | le’alam oulèal’mè ‘almayya | לְעָלַם וּלְעָלְמֵי עָלְמַיָא |
10 | Béni et loué et glorifié et exalté, | Yitbarakh vèyishtabba’h vèyitpa’ar vèyitromam | יִתְבָרַךְ וְיִשְתַבַח וְיִתְפָאַר וְיִתְרוֹמַם |
11 | et élevé et vénéré et élevé et loué | vèyitnassè vèyithaddar vèyit’alè vèyit’hallal | וְיִתְנַשֵא וְיִתְהַדָר וְיִתְעַלֶה וְיִתְהַלָל |
12 | soit le nom du Saint (transcendant), béni soit-il.a | sh’meh dèQoudsha, berikh hou. | שְמֵהּ דְקֻדְשָא בְרִיךְ הוּא. |
13 | au-dessus (et au-dessusc) de toutes les bénédictions | l’eëlla (ouleëlla mikol) min kol birkhata | לְעֵלָא (וּלְעֵלָא מִכָל) מִן כָל בִרְכָתָא |
14 | et cantiques, et louanges et consolations | vèshirata tushbe’hata vènèkhèmata | וְשִירָתָא תֻשבְחָתָא וְנֶחֱמָתָא |
15 | qui sont dites dans le monde ; et dites Amen.a | da’amiran bèal’ma ve’imrou amen | דַאֲמִירָן בְעָלְמָא. וְאִמְרוּ אָמֵן |
Le ‘Hatzi Kaddish finit ici. | |||
Le Kaddish complet (Titqabbal) continue par : | |||
16 | eQue soient reçues (acceptées) les prières et supplications | Titqabbal tz’lotèhone ouva’out’hone | תִתְקַבֵל צְלוֹתְהוֹן וּבָעוּתְהוֹן |
17 | de toute la Maison d’Israël | dekhol bet Israël | דְכָל בֵית יִשְרָאֵל |
18 | devant leur Père qui est au ciel, et dites Amen.a | qodam avouhon divishmayya, vè’imrou amen | קֳדָם אֲבוּהוֹן דִי בִשְמַיָא וְאִמְרוּ אָמֵן |
Le Kaddish des Rabbanim inclut: | |||
19 | Pour Israël et ses rabbanim et leurs étudiants (disciples) | ‘al Israël vè’al rabbanane vè’al talmidehone | עַל יִשְרָאֵל וְעַל רַבָנָן וְעַל תַלְמִידֵיהוֹן |
20 | et tous les étudiants de leurs étudiants | vè’al kol talmideï talmidèhone | וְעַל כָל תַלְמִידֵי תַלְמִידֵיהוֹן. |
21 | et tous ceux qui s’affairent dans la Torah | vè’al kol maan di’os’kine bi’orayta | וְעַל כָל מָאן דְעָסְקִין בְאוֹרַיְתָא. |
22 | ici et en tout autre lieu | di bè’atra hadein vèdi bèkhol atar vè’atar | דִי בְאַתְרָא הָדֵין וְדִי בְכָל אֲתַר וַאֲתַר. |
23 | que soit [instaurée] sur eux et vous une paix abondante, | yèhè lèhone oul’khone sh’lama rabba | יְהֵא לְהוֹן וּלְכוֹן שְלָמָא רַבָא |
24 | la faveur et la grâce et la miséricorde et une vie longue | ‘hinna vè’hisda vè’ra’hameï vè’hayyeï arikheï | חִנָא וְחִסְדָא וְרַחֲמֵי וְחַיֵי אֲרִיכֵי |
25 | une large subsistance et le salut | um’zoneï rèvi’heï oufourqana | וּמְזוֹנֵי רְוִיחֵי וּפורְקָנָא |
26 | de la part de leur Père aux cieux [et sur terre]; | min qodam avouhon di’vishmayya [vè’ar’a] | מִן קֳדָם אֲבוּהוּן דְבִשְמַיָא [וְאַרְעָא] |
27 | et dites Amen.a | vè’imrou amen | וְאִמְרוּ אָמֵן |
Toutes les variantes, sauf le ‘Hatzi Kaddish concluent par les lignes suivantes: | |||
28 | eQu’il y ait une grande paix venant du Ciel, | Yehe sh’lama rabba min shemayya | יְהֵא שְׁלָמָה רבָּא מִן שְׁמַיָּא, |
29 | [ainsi qu’]une [bonne] vie | [vè]’hayyim [tovim] | [וְ]חַיִּים [טוֹבִים] |
30 | et la satiété, et la salvation, et le réconfort, et la sauvegarde | vèsava viyshou’a vènè’hama vèshèzava | וְשָבָע וִישׁוּעָה וְנֶחָמָה וְשֵׁיזָבָה |
31 | et la guérison, et la rédemption et le pardon et l’expiation | ourefou’a ougue’oulla ousli’ha vekhappara | וּרְפוּאָה וּגְאֻלָּה וּסְלִיחָה וְכַפָּרָה, |
32 | et le soulagement et la délivranced | vèrèva’h vèhatsala | וְרֵוַח וְהַצָּלָה |
33 | pour nous et pour tout son peuple f Israël, et dites Amen.a | lanou oulèkhol ‘amo Israël vè’imrou amen | לָנוּ וּלְכָל עַמּוֹ יִשְרָאֵל וְאִמְרוּ אָמֵן. |
34 | eCelui qui établit la paix dans ses hauteurs, | ‘Osse shalom bimeromav | עוֹשֶה שָׁלוֹם בִּמְרוֹמָיו, |
35 | l’établisse [dans sa miséricorde] parmi nous | hou [bèra’hamav] ya’asse shalom ‘alenou | הוּא [בְּרַחֲמָיו] יַעֲשֶֹה שָׁלוֹם עָלֵינוּ, |
36 | et sur tout [son peuple] Israël, et dites Amen.a | vè’al kol [‘amo] Israël, vè’imrou amen | וְעַל כָּל [עַמּוֹ] יִשְרָאֵל וְאִמְרוּ אָמֵן. |
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